My debut album 'Idealist' out on February 5th 2016
A l’instar de nombreux artistes talentueux, l’auteur-compositeur et producteur italien Andrea Tirone, âgé de 27 ans, qui est à l’origine de Mind Enterprises, a toujours été un outsider.
Ce turinois malingre à lunettes passionné de musique, qui a grandi dans une ville principalement réputée pour la richesse de son industrie et les poursuites en voitures filmées pour “L’or se barre”, a vite envisagé une issue de sortie. “Je suis un grand passionné de musique. Vraiment. Je peux très bien passer 24 heures à jouer la même note, encore et encore, sans jamais m’ennuyer, parce que j’ai ce côté un peu fou,” confie Tirone. “Mais je ne me suis jamais reconnu dans la culture italienne.” En fait, malgré la douceur de son climat et la richesse de son économie, Turin n’est pas franchement l’endroit idéal pour un façonneur de sons comme lui. “Au lycée je me sentais un peu isolé. A 12 ans, j’ai acheté mon premier disque : Nevermind. Avant j’écoutais les disques de ma mère et de mon père, les Beatles et la variété italienne des années 70, mais après Nirvana rien n’a jamais plus été pareil et je suis devenu obsédé par la musique.”
Après avoir formé un groupe post-punk à l’adolescence, Andrea Tirone se tourne vite vers la scène anglaise plus dynamique et décide, il y a deux ans, de quitter famille et amis pour s’installer à Londres, une ville qui symbolise pour lui la liberté. Là-bas il espère rencontrer plein d’autres passionnés de musique comme lui et, pourquoi pas, faire carrière. Avant son départ il commence déjà à travailler sur Mind Enterprises en créant des titres à partir de samples de musique traditionnelle africaine du Mali et du Burkina Faso fusionnés avec des guitares post-punk à la Delta 5, Gang Of Four, DNA et autres Contortionists. Ces premiers germes seront ensuite peaufinés et condensés jusqu’à obtenir cette irruption riche en beats et d’une originalité rare qu’il concocte aujourd’hui. Les chansons de Mind Enterprises, un cocktail explosif d’électronica débordante de mélancolie, ne connaissent pas de frontières géographiques et s’apparentent davantage à une sorte de rêve éveillé qu’à une mélodie structurée ébauchée au préalable.
A Londres, Tirone remplit son ordinateur portable de chansons et élabore une liste de 100 labels à contacter. Au bout de dix labels à peine, il a la chance de recevoir une réponse favorable de Double Denim Records, l’une des meilleures écuries indé de la capitale anglaise. ‘Summer War’, qui sort vers la fin août 2012, donne un premier avant-goût du curieux mélange entre guitares mélodieuses et un savant tintamarre qu’il concocte. Peu de temps après Because Music se montre intéressé. Avec son catalogue alléchant, réunissant notamment Metronomy et Django Django, ce label s’impose comme la solution idéale pour un artiste désireux comme lui de se lancer dans des expérimentations et de façonner son propre genre.
Même si ce premier album a été enregistré à Londres, ce changement de lieu n’a pas vraiment eu d’impact sur le son de Tirone, dans la mesure où il travaille sur un ordinateur plongé dans le noir : “Je ne peux pas travailler à la lumière du jour. Je trouve que dans le noir on se concentre mieux sur le son. Je déteste voir le soleil se coucher lorsque je travaille parce que ça me perturbe, ni sentir le monde bouger autour de moi.” Pour compenser ces longues nuits, il dort environ dix heures par jour. “Lorsque je me dis que je dois écrire et qu’il faut vraiment que je le fasse, je n’arrive absolument à rien. L’inspiration me vient en fait lorsque je n’ai pas d’obligations,” explique Tirone à propos de sa façon de fonctionner à l’instinct. “Raconter une histoire relève selon moi du domaine de la magie et il est impossible d’expliquer comment on procède, ce n’est pas quelque chose de conscient,” dit-il.
Comme Tirone travaille dans une espèce d’état second, ses paroles s’apparentent davantage à un mantra, s’enroulant et s’entremêlant entre des beats et des samples imparables. “Les paroles sont la dernière étape de mon travail. Elles sont importantes, mais ne constituent pas le point de départ d’une chanson. Les mots que je mets dans ma musique sont évocateurs et pas vraiment rationnels - il s’agit juste d’une émotion, abstraite. J’y évoque toujours des gens et surtout des filles,” confie-t-il en souriant.
Contrairement à la plupart des productions de musique électronique, obnubilées par la finesse de la pop et du R&B, Mind Enterprises est unique par son caractère brut et lo-fi lié à sa passion pour les guitares, “Je suis arrivé à un stade où j’ai l’impression ce n’est pas la qualité du son et la production qui compte. Trop de perfectionnisme nuit et risque de tout aseptiser… Je crains qu’on ne perde le lien émotionnel du départ – la qualité audio n’est pas l’essentiel. Dans la musique il faut savoir être un peu punk,” dit-il.
C’est justement ce côté passionné qui rend les paysages sonores de Mind Enterprises si radicaux, beaux, intenses et plein d’imagination, et peut-être aussi l’une des raisons pour lesquelles il ne rentrera jamais vraiment dans aucune scène ou catégorie. C’est peut-être aussi l’une des raisons de son futur succès. “Mind Enterprises est un projet qui vient du fond de moi, qui parle du pouvoir des idées. Le pouvoir de l’esprit c’est ce qu’il y a de plus important,” déclare Tirone, “La musique c’est quelque chose qui permet d’échapper à la réalité.”