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Elli Medeiros naît à Montevideo, en Uruguay le 18 janvier 1956, où elle mène une vie d’enfant actrice : sa mère Mirtha est une comédienne de théâtre, et elle emmène sa petite fille de répétitions en spectacles. À quatre ans, Elli suit ses traces et joue le fils de Madame Butterfly à l’Opéra de Montevideo, tous les rôles d’enfants lui seront dévolus, au théâtre ou à la télévision. À l’âge de 14 ans, Mirtha, Elli et son beau-père (son père a quitté le foyer quand elle avait cinq ans) quittent l’Uruguay pour l’Argentine, puis s’installent à Paris. Elli parle bien sûr l’espagnol, l’anglais couramment, mais pas un mot de français. Elle apprend la langue en quelques mois, pour s’inscrire dans une école d’art, mais abandonne ses études avant le bac pour se consacrer au groupe de rock qu’elle a formé avec son petit ami Jacno.
Voiturettes punkLes Stinky Toys deviennent rapidement cultes, au moment où l’on découvre le mot punk. Le culte devient plus large quand ils sont invités à jouer à Londres, au 100 Club, dans le premier festival du genre en septembre 1976 avec The Clash et The Sex Pistols. Quelques jours après, c’est une photo d’Elli qui remplit la couverture du Melody Maker, l’hebdo musical de référence, ce qu’aucun autre « Français » n’a accompli depuis. Lors de la même soirée, Malcolm McLaren, le sémillant manager des Sex Pistols, remarque cette amusante façon qu’a Elli d’assembler ses vêtements déchirés à l’aide d’épingles de nourrice. Il lui vole le concept avec le succès que l’on sait ! L’accessoire de couture est devenu le symbole du mouvement punk, ce qui laisse de marbre les « Toys » qui n’ont jamais réellement souscrit à ce mouvement, et se sont toujours définis comme un groupe de rock ’n’ roll, fans des Who et des Rolling Stones.
Les Stinky Toys, après un premier 45 tours, « Bozy Creed », signent pour un album chez Polydor. Ce premier album homonyme, dont la pochette est réalisée par Elli Medeiros, est brouillon mais fondateur d’une certaine idée du rock français, en 1977. Devant l’insuccès notoire de ce disque, les « Toys » se voient rendre leur contrat, et signent pour leur nouvel opus chez Vogue. Le second Stinky Toys, dit « l’album jaune » (pendant de l’album vert), est plus mature, mais il reste aussi incompris, en dehors du cercle étroit des aficionados, dont certains, devenus musiciens, réclament leurs services pour produire leur disque. C’est le cas d’Etienne Daho, et de Lio, qui reprend « Lonely Lovers » sur l’album jaune pour en faire « Amoureux solitaires », un tube phénoménal.
Couple pop pour conte moralLe groupe séparé, Jacno expérimente à la fois le succès et l’électronique, en se classant n°1 du Top 50 avec « Rectangle », un menuet instrumental qui mêle les accords aigrelets de la Rickenbaker et la boucle robotique des premiers synthétiseurs. Elli Medeiros chante sur un titre du EP qui accompagne « Rectangle », et le couple, qui ne l’est plus tellement à la ville, devient Elli & Jacno, un duo mixte, comme on en verra tant dans les années 1980 (Les Rita Mitsouko, Niagara etc.). Les albums du duo, Tout Va Sauter et Boomerang, installent la popularité d’Elli & Jacno, grâce aux nombreux 45 tours à succès qui en sont extraits (« Main dans la main », « Oh la la », « Le Téléphone » …), dans un univers techno-pop pastel et joyeux. C’est pour un film d’Eric Rohmer, Les Nuits de la pleine lune (où ils apparaissent), qu’Elli & Jacno mettent fin à leur aventure commune (après un enfant et quelques disques historiques), en signant la B.O. de ce conte moral.
Pour sa carrière solo, Elli Medeiros va se rapprocher de ses racines sud américaines, encouragée par son nouveau compagnon Ramuntcho Matta (fils du peintre chilien Roberto Matta). L’album Bom Bom en 1986 contient « Toi mon toit » qui est un des tubes de cet été, et la chanson fétiche des manifestations lycéennes de l’époque ! Tout aussi salsa / calypso, « A Bailar Calypso » est un autre triomphe populaire, en haute rotation sur les radios et les télévisions. Elli est partout, sur la couverture de Playboy (en 1986), chez Futuropolis où elle publie une bande dessinée, sur les disques de son ami Etienne Daho, où elle assure quelques duos, et dans quelques films de Philippe Garrel, Olivier Assayas ou Toni Marshall. Le reste du temps, elle élève ses quatre enfants. Dans les années 1990, elle laisse de côté la musique pour se consacrer à la comédie, on la voit dans plusieurs films, très populaires, comme Jet Set, ou plus art et essai. Un temps compagne du réalisateur américain Brian De Palma, elle réalise pour son film Femme Fatale le bijou qui est une des clefs du film, s’appuyant sur son expérience de styliste (elle a travaillé avec son ami Jean-Charles de Castelbajac, et proposé des lignes d’accessoires et de mode).
Véritable icône du rock, elle décide un soir de 2005 de refaire un album, sur l’instigation d’Etienne Daho qui va le produire. EM, paru à l’automne 2006, est une bourrasque dans l’esprit des Toys, proto punk et définitivement rentre dedans. La chanson « Soulève-moi », au texte explicite, voisine avec une reprise en duo avec Daho du standard de Marilyn Monroe « My Heart Belongs to Daddy ». Elle donne à cette occasion quelques concerts, mais l’album connaît un succès trop limité pour permettre une véritable tournée. Depuis, on a revue Elli Medeiros au cinéma (Après lui de Gaël Morel avec Catherine Deneuve, Leonera, présenté à Cannes en 2008…), et on l’entendra sans doute encore sur des albums à venir.